Atelier 207 :résistance

© Julien Ribot

Un grand merci à Bricabook et à Julien Ribot pour cette photo  

brrr quel froid…

 Je sais bien que ce n’est pas mon premier hiver… mais quel froid… Et puis, qui a bien eu cette idée folle de faire que les arbres perdent leurs feuilles en hiver ? Ce serait justement le moment d’avoir quelque chose pour se protéger, pour faire écran au vent… tandis que là, tout nu….

Encore un hiver… je ne les compte plus…. Je suis fatigué.

Je n’ai plus envie. Plus l’envie de dresser mes branches vers le ciel. Plus envie de protéger ces satanés hommes du soleil en produisant de l’ombre.
Je leur en veux à ces humains. Ils sont petits, touts petits et ils décident de tout. J’étais au cœur d’un superbe bosquet avant. J’avais mes congénères autour de moi. Et c’était si bien. On faisait des concours à celui qui faisait les plus belles feuilles, à celui qui en aurait le plus sur ses branches.

On en a protégé des histoires d’amour naissantes, des baisers volés, des caresses échangées… Ce que je préférais c’était veiller sur les bébés endormis que les agriculteurs « confiaient » parfois à notre surveillance. Ils les déposaient dans leurs coussins, sous nos branchages, sous notre protection… le temps d’aller surveiller les champs, d’aller parfois faire une sieste… C’est pour ça qu’il y avait parfois des tapis de mousse à nos pieds… C’était doux de les regarder dormir ces petits êtres en devenir. Innocents. J’aimais aussi quand un peu plus grand, les enfants montaient dans nos branches, se défiaient pour savoir qui monterait le plus haut…
Maintenant le défi est d’avoir le plus beau portable…

Et maintenant les touts petits ont grandi…. et ils ne veulent plus qu’une chose, agrandir leur route, , bétonner et pour cela… ils ont coupé tous les arbres qui m’entouraient. Je suis le seul résistant, le seul encore debout… mais pour combien de temps ??Je suis partagé entre me laisser mourir pour ne pas leur donner le plaisir de me couper, et résister encore et encore, juste pour que les plus jeunes n’oublient pas qu’ici il y avait des arbres, qu’ici leurs aïeuls se sont aimés ….
Comment faire ? Comment être un arbre, être symbole de vie dans ce monde actuel ?