mardi 29 août 2017

L’enfant qui mesurait le monde (Metin Arditi)



 L'Enfant qui mesurait le monde

  •  L’enfant qui mesurait le monde (Metin Arditi)
  • Broché: 264 pages
  • Editeur : Points; Édition : 01 (1 juin 2017)
  • Collection : POINTS
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2757864483
  • ISBN-13: 978-2757864487



Mon résumé :
Les chiffres, c’est l’obsession de Yannis, 11 ans. Il DOIT savoir, tous les jours, dans quel ordre sont rentrés les bateaux au port, combien de kilos de chaque sorte de poissons chaque pêcheur a rapporté… Et chaque soir à 20h, il doit compter combien il y a, au café, de clients (sur la terrasse et à l’intérieur).
Pourquoi ? Pour comparer avec les chiffres de la veille.
Pourquoi ? Parce que s’ils sont identiques, alors c’est que le monde est stable et l’angoisse du jeune garçon diminue.
Mais voilà qu’un promoteur immobilier envisage de construire un grand complexe touristique sur la petite île… menaçant de rajouter de l’instabilité dans la vie de la petite île grecque.
Comment dès lors faire obstacle au chaos ?
Mon avis
Une fois n’est pas coutume, j’ai lu ce livre deux fois (à un mois d’intervalle). J’avais l’impression d’être passée à côté de cette histoire. Et j’ai eu raison.
Ma deuxième lecture m’a permis de mieux appréhender à la fois l’histoire dans sa globalité et les relations entre les personnages.
Dans cette histoire, on s’aperçoit qu’il n’y a pas que Yannis qui est obnubilé par les chiffres et la volonté de maîtriser le monde. La seule différence c’est que lui ne peut maîtriser son angoisse, lutter contre elle quand elle l’envahi. Chaque changement (même la position de son bol par rapport à son verre) est pour lui inacceptable, insupportable.
A ce sujet, je trouve que l’auteur décrit bien le quotidien des parents autistes : l’obligation de tout anticiper, de tout refaire toujours à l’identique. Il parle de la difficulté d’introduire des nouveautés dans la vie des personnes ayant des troubles du spectre de l’autisme, la nécessité de le faire petit à petit, d’accepter de continuer malgré les refus, et ce sans savoir si on atteindra son but. A travers le quotidien de Maraki, la mère de Yannis, on comprend combien tout cela est pesant, angoissant. Car une question tourne dans la tête de cette mère : que se passera-t-il quand il sera plus grand, et surtout quand elle ne sera plus là pour s’occuper de lui ?  On ressent la lutte entre ses regrets d’avoir abandonné (par obligation) sa vie de femme, et son amour infini pour son enfant.

Eliott, l’architecte américain, arrivé sur l’île un peu par accident, à la suite de la mort de sa fille, 12 ans auparavant, est lui aussi obsédé par les chiffres et la mesure. Depuis 12 ans, il recherche, dans le monde, la présence du nombre d’or dans l’architecture grecque… poursuivant ainsi le travail de sa fille. Pour lui le nombre est un moyen de communiquer avec cette dernière, de faire son deuil aussi. Une façon de re-maîtriser un monde déséquilibré depuis qu’elle est partie.

Ce livre pose aussi la question de notre capacité, à nous les humains, à maîtriser notre monde. Cette maîtrise est-elle la condition de notre bonheur ? On pourrait penser que oui, mais paradoxalement c’est un évènement imprévisible (l’arrivée d’Eliott) qui va rendre l’existence de Yannis plus « stable ». et l’enfant moins anxieux.
En fait, par cette histoire d’amitié entre un homme blessé et un enfant autiste, l’auteur nous montre aussi que ce qui rend le monde beau, vivable ce n’est finalement pas l’argent, ni les choses tangibles comme les bâtiments… Non ce sont les liens qui se tissent entre les hommes, qu’ils soient amoureux ou amicaux, qui rendent le monde prévisible en nous amenant à accepter l’imprévisible.
Comme le dit le prête de l’île à propos de Yannis : « Cet enfant porte en lui toute la douleur des hommes […]. L’immense solitude et l’impossibilité désespérante de s’ouvrir à l’autre. »
J’espère que vous pardonnerez la maladresse de cette longue critique… Je crois que je garderai longtemps l’image de ce village qui se fige à 20h chaque soir, pour qu’un jeune garçon, pourtant ‘peu sociable’ puisse exécuter son rituel et être un peu moins anxieux.
Un coup de cœur !!!

3 commentaires:

  1. Quelle bonne idée de donner une seconde chance à ce roman. Je le note, forcément.

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    1. c'est rare quand j'ai le temps de le faire mais j'ai bien fait !!!!

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  2. J'avais été moins enthousiaste que toi...

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